Morsure de vipère : comment bien réagir ?

Morsure de vipère : comment bien réagir ?

La vipère, comme chacun le sait, est un serpent venimeux dont on redoute la morsure. C’est d’ailleurs, en France métropolitaine, le seul reptile sauvage qui puisse être dangereux pour l’homme. Il y en a d’autres sur le territoire national, mais il faut aller en Guyane, à la Martinique ou en Nouvelle-Calédonie pour les rencontrer.

Le printemps montrant le bout de son nez, les vipères, ainsi que tous les animaux à sang froid, sortent de leur retraite hivernale afin de se réchauffer au soleil. Et la bronzette commence dès le mois de mars pour se terminer en octobre ou novembre.

Ainsi, durant huit ou neuf mois, on peut croiser le chemin des vipères.

Mais doit-on pour autant redouter de se faire mordre ? Et si cela arrive, comment doit-on réagir ?

Pour se rassurer un peu 🙂

Tout d’abord, il faut se dire qu’on ne rencontre pas de vipère tous les jours.

Pour notre part, après une trentaine d’années de randonnée et plusieurs milliers de kilomètres de marche, nous avons croisé le chemin d’une seule vipère. C’est très facile à compter… et à se souvenir 🙂 .

Par contre, nous avons vu de très nombreuses couleuvres…

Comment distinguer une vipère d’une couleuvre ?

D’après ce qu’on nous disait à l’école, c’est vraiment très, très simple : il suffit de regarder la pupille des yeux et la forme des écailles sur la tête !

Vipère péliade (Frank Vassen – CC BY 2.0) – Couleuvre à collier (Darkone – CC BY-SA 2.5)

Mais, même s’il est vrai que ce sont des éléments distinctifs entre vipère et couleuvre, il n’est pas tellement évident de se rappeler ce genre de détails dans la panique qui suit une morsure de serpent !

Il nous paraît beaucoup plus pertinent d’essayer de se souvenir de l’apparence générale du serpent. Une couleuvre (quelle que soit son espèce) semble plus fine et a une allure générale plus fluide et des formes plus arrondies qu’une vipère (aspic ou péliade, selon la région). Cette dernière, en effet, a une tête plus large, triangulaire, plus anguleuse et comme « taillée à la serpe ». Les flancs de son corps sont verticaux alors que la couleuvre, elle, a un ventre plus arrondi.

En plus de sa forme plus trapue, la vipère se reconnaît aussi par les dessins géométriques qui couvre son dos. La robe de la couleuvre, quant à elle, est souvent beaucoup plus uniforme.

La vipère en régression

De plus, la vipère fait partie des animaux qui ont tendance à lentement disparaître. Ce recul semble en grande partie dû à la progression de l’agriculture industrielle qui détruit haies et bocages.

Il est d’ailleurs bien de savoir où habite la vipère, afin de prêter attention aux endroits où elle peut se trouver.

La vipère est présente dans toute l’Europe, sauf en Irlande, dans la plus grande partie de la péninsule ibérique, en Corse, en Sardaigne et en Grèce. La vipère aspic se rencontre dans une grande partie sud de la France (sauf les bords de la Méditerranée), en Italie (dont la Sicile), dans l’ouest de la Suisse et au nord de l’Espagne. La vipère péliade occupe le reste de l’Europe.

La vipère, aspic ou péliade, préfère les friches, les murets, les tas de pierres et les terrains accidentés, principalement secs. Mais on peut aussi la croiser aux abords des forêts, dans les haies. La vipère aspic se rencontre également dans des milieux plus humides.

La vipère et le risque de morsure

Comme tout animal sauvage, la vipère a tendance à fuir l’homme.

Ainsi, ce n’est pas parce qu’on rencontre un serpent qu’on se fait forcément mordre. Dans notre cas, la belle a pris la fuite dans les buissons qui bordaient le chemin.

De plus, la vipère se nourrit principalement de petits rongeurs qu’elle tue (avec son venin) avant de les avaler. Le venin, qui paralyse la proie et aide à sa digestion, est donc un élément vital pour elle. Et comme il lui faut plusieurs heures pour fabriquer une nouvelle dose, elle ne va pas s’amuser à le gaspiller.

Le risque de morsure est donc assez faible : en fait la vipère ne mord que si elle se sent attaquée ou prise au piège. Elle ne réagira que si l’on pose le pied tout près d’elle, qu’on met la main dessus accidentellement ou qu’on la prenne (la croyant morte) alors qu’elle somnolait au beau milieu du chemin…

Il n’est pas très courant de voir un reptile se dorer la pilule sur un chemin ensoleillé. Mais nous l’avons déjà vécu, comme lors de notre première randonnée en survie douce.

morsure vipère péliade enroulée, la tête posée sur son corps
Vipère péliade (Zdeněk Fric – CC BY-SA 3.0)

Précautions à prendre pour limiter les risques de morsure de vipère

Tout d’abord, nous conseillons de porter de bonnes chaussures de randonnée, montantes. Ce point est pour nous vraiment très important. De notre point de vue, les chaussures et le sac à dos sont les seuls éléments de l’équipement du randonneur à ne pas négliger. Et il faut y mettre le prix. C’est important.

Ensuite, lorsque l’on aperçoit un serpent mort au milieu d’un chemin ensoleillé, on le laisse tranquille et on en fait le tour. Le reptile est sans doute en train de somnoler en faisant tranquillement bronzette. Si l’on se penche sur lui, il y a de grandes probabilités que le serpent « ressuscite », prenne peur et morde. C’est aussi un petit truc à enseigner aux plus jeunes.

On peut aussi se faire mordre lorsqu’on s’assoie par terre ou sur un muret ou sur une pierre. C’est la même chose quand on s’appuie contre un tas de bois. Il suffit simplement de vérifier où l’on pose les mains et les fesses.

Et c’est la même chose lorsqu’on ramasse quelques chose : bien regarder où l’on met les doigts…

En dernier lieu, il est préférable de ne pas marcher en solitaire. Cela ne va pas limiter les morsures mais, à plusieurs, c’est plus simple de gérer les secours.

La morsure de la vipère est-elle toujours dangereuse ?

La morsure sèche

Il faut aussi savoir que la vipère peut très bien mordre sans injecter de venin : c’est ce qu’on appelle la morsure sèche. Et c’est ce qui se passe environ une fois sur deux.

Dans ce cas, ce n’est pas plus grave que la morsure d’une couleuvre et les symptômes sont simples et peu inquiétants :

  • Traces de morsure (2 points, correspondant aux crochets venimeux)
  • Douleur au niveau de la morsure
  • Rien d’autre si ce n’est de l’inquiétude et de l’incertitude quant à la gravité de la morsure
morsure vipère couleuvre à collier enroulée
Couleuvre à collier (Jodlowski – Pixabay)

La morsure envenimante

Si la vipère a décidé d’injecter son venin, on parle de morsure envenimante.

Là, les symptômes sont généralement assez légers. Cela va en fait dépendre de la dose de venin que le serpent a injecté et aussi des réactions physiologiques de la victime.

En général, les symptômes « se résument » à :

  • Traces de morsure (2 points, correspondant aux crochets venimeux).
  • Douleur vive au niveau de la morsure.
  • Rougeur et gonflement autour des points de morsure. Cet œdème a toutefois tendance à s’étendre autour de la zone de la morsure. Parfois, cette réaction concerne tout le membre mordu.

A ces réactions physiques qui se manifestent dans les minutes rapidement, peuvent s’ajouter dans la demie heure qui suit :

  • Des troubles digestifs : maux de ventre et diarrhée et/ou nausées et vomissements.
  • Des troubles respiratoires : oppression et difficultés pour respirer.
  • Des troubles psychologiques : confusion.
  • Des troubles cardiovasculaires : malaise avec chute de tension artérielle, saignements.

Toutes ces complications peuvent donc apparaître un « certain temps » après la morsure de la vipère. Et il faut plusieurs heures pour que les symptômes se développent et que la victime soit au plus mal. Les secours ont donc un peu de temps pour intervenir.

Le choc anaphylactique

Cependant, si la personne mordue est allergique au venin, il peut se produire un choc anaphylactique, tout de suite après la morsure. C’est, grosso modo, une chute de tension brutale (et grave) entraînant l’ensemble des complications citées ci-dessus, en accéléré. On a donc très peu de temps pour agir. Dans ce cas, la morsure d’une vipère peut être très préoccupante.

Seul le SAMU pourra vous guider sur la conduite à tenir, à moins que la personne ait déjà fait un malaise de ce type. Elle aura alors avec elle la dose d’adrénaline qui va bien.

Que faire en cas de morsure de vipère (ou autre serpent) ?

Dans tous les cas, quel que soit le serpent, quel que soit l’état de la morsure, il faut :

  • Rester calme et tranquilliser la victime et son entourage. C’est le moment de se souvenir qu’une morsure de vipère est rarement mortelle et qu’il faut plusieurs heures pour que le venin agisse pleinement.
  • Appeler les secours, en étant le plus clair, précis et concis possible (voir la procédure ci-dessous).
  • Appliquer tous les conseils et directives donnés par le SAMU. Et si, dans la panique (il est parfois difficile de réellement se calmer et d’avoir les idées claires), vous avez oublié certains détails, n’hésitez pas à les rappeler.

Procédure d’appel d’urgence

  • Composer le 15 (Service d’Assistance Médicale Urgente) ou le 112 (numéro d’urgences européen). On peut appeler ces numéros depuis n’importe quel téléphone, fixe ou mobile, même bloqué.
  • Donner le numéro de téléphone sur lequel les secours peuvent rappeler, même si ce numéro est celui avec lequel vous les appelez.
  • Se présenter : prénom et nom.
  • Décrire l’accident succinctement. Dans ce cas précis, c’est très simple : morsure de serpent en essayant de décrire le reptile (allure générale, taille, couleur, forme de la tête…).
  • Présenter la victime : prénom et nom, mais surtout âge (enfant, adulte, personne âgée…).
  • Décrire la blessure (s’il y a ou non 2 points correspondant aux crochets, rougeur, gonflement…).
  • Localiser le plus précisément possible l’accident. C’est souvent le point le plus problématique quand on est en rase campagne : essayer de se souvenir du nom du dernier endroit habité qu’on a traversé, s’aider de sa carte papier, de son GPS, de son application All Trails, Komoot… Tous les indices sont bons, même le lieu où est garée la voiture. Les secours sauront vous poser les bonnes questions pour vous localiser précisément.
  • Répondre aux questions que l’interlocuteur du centre de secours va poser.
  • NE JAMAIS RACCROCHER, tant que l’interlocuteur du SAMU ne l’a pas demandé.

Mais que mettre dans sa trousse de secours ? Voici ce que nous conseillons.

BIEN ! 🙂 À faire en cas de morsure de vipère (ou autre serpent)

Nous vous indiquons ici un protocole à suivre si vous avez des difficultés à contacter le SAMU ou qui peut servir d’aide-mémoire. Cependant, ces conseils ne remplacent pas les consignes des secouristes, qu’il faut absolument pouvoir contacter à un moment ou à un autre. Et si vous avez pu contacter le SAMU, conformez-vous à leur recommandations, adaptées à votre cas.

Voici donc ce qu’il est généralement conseillé de faire :

  • Mettre la victime au repos. L’asseoir, en veillant à ce que le cœur soit plus haut que la morsure. Immobiliser le membre mordu. Ceci est important pour ralentir le plus possible la circulation sanguine et limiter la vitesse de diffusion du venin dans l’organisme.
  • Retirer (préventivement) tout ce qui pourra comprimer si l’œdème s’étend : bagues, bracelets, chaussures, chaussettes… En effet, en réaction au venin, la zone de la morsure va enfler. Ce gonflement peut toucher, petit à petit, tout le membre concerné.
  • Désinfecter la zone de la morsure avec un antiseptique.
  • En cas de douleur, donner du paracétamol. Ne pas utiliser d’aspirine, qui fluidifierait le sang et accélérerait la propagation du venin. Ne pas utiliser non plus d’anti-inflammatoire. Quoi qu’il en soit, avant de prescrire un médicament (même un « bête » efferalgan), demander l’avis du SAMU.
  • En cas de perte de connaissance, appeler si possible le SAMU et appliquer leur directives. Sinon, mettre la personne en Position Latérale de Sécurité, le membre mordu au-dessus, pas contre le sol.
  • Rester avec la victime jusqu’à sa prise en charge par les secours.
  • Si vous devez partir pour chercher du secours, ne pas laisser la victime seule, sans adulte. Dans ce cas, se déplacer ensemble, sans essoufflement (privilégier terrain plat et descente, même si le chemin est un peu plus long).
morsure vipère mannequins en bois illustrant la mise en Position Latérale de Sécurité
Mise en P.L.S. (succo – Pixabay)

PAS BIEN ! 🙁 À ne surtout pas faire en cas de morsure de vipère (ou autre serpent)

  • NE JAMAIS FAIRE UN GARROT. Il n’y a que dans les films où l’on pose des garrots à tout va. Dans la réalité, on fait un garrot quand on n’a pas d’autre alternative. C’est un acte de la dernière chance, réalisé le plus souvent sur des champs de bataille, lors d’attentats ou d’accidents impliquant de nombreuses victimes. C’est tellement sérieux qu’une personne garrottée est prioritaire au bloc opératoire. De plus, un garrot entraîne des souffrances atroces.
  • Ne pas compresser la zone de la morsure ou le membre mordu (pas de bandage…).
  • Ne pas mettre de pommade.
  • Ne pas sucer la plaie, ni l’inciser.
  • Ne rien injecter : les kits anti-venin ne sont pas efficaces. L’injection de ces produits peut d’ailleurs retarder la prise en charge de la victime.
  • Ne pas donner d’alcool à la personne mordue. Pas de tabac non plus.

Le cas de la pompe à venin

Vous avez sans doute remarqué que nous n’avons jamais parlé de pompe à venin dans les listes d’actions à faire ou à ne pas faire.

Ces consignes sont issues différents sites, notamment celui de la Sécurité Sociale qui ne conseille pas l’utilisation de pompe à venin. En effet, son action bénéfique ne semble pas avoir été démontrée.

Les centres anti-poison sont d’ailleurs sur la même longueur d’onde. Cependant, pour eux, l’utilisation d’une pompe anti-venin n’est pas dangereuse en soi et n’aggravera pas l’état de la victime.

Le risque, pourtant, est que la personne qui utilise un tel appareil se sente complètement sauvée et se dise « puisque j’ai aspiré le venin, je n’ai plus rien à craindre ! »

Or, ce n’est pas aussi simple. D’ailleurs, si les spécialistes du secours mettent en doute l’efficacité d’une pompe à venin, ce n’est sans doute pas pour rien.

En résumé, si ça ne fait pas de bien, ça ne fera pas de mal… à condition de respecter tout le protocole recommandé par le SAMU ou, à défaut, proposé ci-dessus jusqu’à la prise en charge par les secouristes. Toute morsure de serpent doit en effet être vue par un médecin.

En ce qui nous concerne, nous utilisons une pompe anti-venin pour limiter les effets des piqûres d’insectes ou de tiques.

L’hôpital

Après sa prise en charge par les secouristes, la victime est généralement emmenée à l’hôpital où on lui prodiguera tous les soins nécessaires. Le fameux sérum anti-venin n’est d’ailleurs pas systématiquement administré, le risque d’effets indésirables étant assez important.

Un suivi médical est ensuite mis en place.

La morsure de vipère, en bref

Se faire mordre par une vipère n’est pas très courant. Et quand cela arrive, ce n’est pas forcément grave. De toute façon, il faut garder en tête que l’on a généralement plusieurs heures pour agir.

Le cas le plus inquiétant se produit quand la personne mordue fait un choc anaphylactique dû à une allergie au venin.

Une morsure de vipère, ce n’est pas anodin. Cela signifie aussi la fin de la randonnée car il faut absolument se mettre en sécurité. Et, quelle que soit la gravité de la morsure (vipère ou non), il est plus que conseillé d’appeler les secours, de suivre leurs consignes et de voir un médecin.

D’ailleurs, nous vous recommandons vivement de parler, de manière préventive, de la morsure de vipère à votre médecin traitant. Il aura sans doute quelques bons conseils (adaptés à votre état de santé 🙂 ) sur le sujet…


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10 réflexions sur « Morsure de vipère : comment bien réagir ? »

  1. Merci pour cet excellent article! J’avoue que je ne sais jamais reconnaitre une vipère d’une couleuvre (et je n’arrive pas plus à retenir lequel de ces deux serpents est dangereux!!) Je me souviens de ma maman qui me disait de taper des pieds quand je me déplaçais dans les hautes herbes pour faire fuir les serpents. Est-ce efficace?

    1. Oui, taper du pied (ou du bâton) est un truc efficace pour éloigner les vipères (et les autres serpents). Ces animaux sont en effet sensibles aux vibrations.

  2. Merci ! Un jour j’ai eu un serpent qui s’est lovée à l’entrée de chez moi juste à ma porte et j’ai eu vraiment du mal à savoir si ce n’était pas une vipère ou une couleuvre. J’aurai bien aimé avoir lu ton article avant. Tu n’as pas parlé des animaux, y a t’il souvent des morsures pour les chiens qui accompagnent en liberté?

    1. Merci d’aborder l’idée. N’ayant pas de chien, nous n’avons tout simplement pas pensé à en parler. C’est pourtant important.
      Et pourquoi pas un sujet pour un prochain article 😉 !
      Nous avons contacté des vétérinaires et, a priori, ça dépend du tempérament du chien : un chien joueur ou chasseur ira plus facilement au contact du serpent (donc plus de risque de morsure).

  3. Superbe article qui m’a replongé dans mon enfance lorsque mon grand père qui était pharmacien en montagne m’avait appris les mêmes choses lors de nos randonnées … 🙏

  4. Article très intéressant et bien complet ! Il me semble avoir déjà vu dans mon potager deux bébés vipères… Ils se sont enfui en me voyant ! Par contre, mon chat en avait attrapé une… La morsure est-elle dangereuse pour lui ? Le seul serpent que nous, humains, avons croisé en randonnée s’était fait la malle sur notre passage ! Mais un petit rappel sur les conseils de sécurité ne fait néanmoins jamais de mal… 😉

    1. Les vipéreaux ont, comme leurs parents, du venin. Mais en proportion de leur taille, bien sûr. Ils sont donc moins dangereux pour nous, les enfants ou nos compagnons à 4 pattes. En cas de morsure, il faut bien sûr emmener le chat chez le vétérinaire.

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