Nous nous lançons cette semaine dans une courte randonnée au monastère abandonné de Katholiko, au nord-ouest de la Crète.

Alors que notre escapade au plateau de Lassithi nous fait connaître un peu l’histoire et les légendes de la Crète antique, cette courte randonnée à Katholiko nous fait découvrir des évènements un peu plus récents de cette île magnifique.

Allez, en route pour cette randonnée ; Katholiko n’est pas très loin de Chania dans le nord-ouest de la Crète.

Le monastère de Gouvernéto

Le monastère de Gouvernéto est donc situé au fin fond de la Péninsule d’Akrotíri. On l’atteint par une petite route sinueuse depuis le monastère d’Agía Triáda des Zangeroli.

L’oratoire

Le 16 juin 1821

Quelques centaines de mètres avant Gouvernéto se trouve un petit oratoire, au bord de la route. Il est érigé en mémoire de l’exécution par les Ottomans de sept moines qui fuyaient la mise à sac de leur monastère. Cet événement tragique a lieu le 16 juin 1821 et intervient dans le cadre troublé du début de la guerre d’indépendance de la Grèce.

En effet, la Crète est alors sous la coupe de l’Empire ottoman depuis plus de cent cinquante ans.

Les autorités musulmanes tentent donc de juguler la rébellion. C’est pourquoi la répression s’abat sur l’Église orthodoxe, considérée comme meneuse et instigatrice de la révolte.

Cela se passe à peine quelques mois après le début de la guerre d’indépendance…

Le 25 mars 1821

C’est apparemment la révolution française qui fait germer les graines de l’indépendance grecque. Il faut toutefois attendre le 6 mars 1821 qu’Aléxandros Ypsilántis engage en Moldavie les premiers combats contre l’oppresseur. Ali Pacha, gouverneur albanais pour le compte des Ottomans, suit le mouvement et cherche lui aussi à gagner son autonomie.

Cependant, dès 1806, le prêtre Thymios Vlachavas prit les armes et mène la révolte contre les troupes ottomanes dans le nord de la Grèce. Nous en parlons un peu mieux dans notre article sur les Météores.

Le 23 mars, profitant de la situation, les indépendantistes grecs déclarent la guerre depuis l’église des Saints Apôtres de Kalamata.

Le 25 mars, jour de l’Annonciation (ô combien important et symbolique pour les orthodoxes), l’archevêque Germanos proclame le début de la guerre d’indépendance de la Grèce.

Les combats dureront dix ans et mèneront à l’autonomie du pays. Toutefois, suite à l’échec de l’insurrection en Crète, l’île reste ottomane jusqu’en 1897. On ne la rattachera à la Grèce qu’en 1913, après quelques année d’indépendance.

Le monastère

À partir du parking, nous entrons dans les jardins qui jouxtent les bâtiments du monastère. Aujourd’hui, ils sont exceptionnellement fermés. Nous ne les visiterons donc pas.

Nous ne voyons le monastère que de l’extérieur. Et, comme pour celui d’Agía Triáda, les bâtiments conventuels où vivent les moines entourent une grande cour quasi carrée. C’est au milieu de celle-ci que se trouve l’église. L’ensemble paraît très austère de l’extérieur mais la cour de ces monastères est généralement très joliment aménagée.

Depuis plusieurs années, les moines restaurent leurs bâtiments. La tour nord-ouest, d’ailleurs, est en pleine réfection.

Les chèvres

La verdure des jardins contraste fortement avec l’aridité des montagnes alentour. Il suffit de passer le petit portail pour se retrouver dans un tout autre monde

Quelques chèvres accompagnent notre départ de leurs bêlements.

Le chemin qui part d’ici est entièrement pavé et bien entretenu. Nous suivrons ce sentier aménagé jusqu’à l’ancien monastère de Katholiko.

Mais avant de le rejoindre, nous allons faire une pause à la grotte de l’ours.

Le monastère de Katholiko est une étape importante dans notre découverte de la Crète ; toutefois, si vous souhaitez découvrir d’autres spots de randonnée en Grèce, nous avons préparé un petit récapitulatif de nos meilleures escapades…

La grotte d’Arkoudospilio/Σπήλαιο Αρκουδόσπηλιο

Au centre de la grande salle de la grotte, se trouve un stalagmite qui ressemble à un ours. C’est pourquoi cette grotte porte le nom d’Arkoudos/Aρκούδες, qui signifie « ours ».

Selon la tradition locale, cet ours, bien vivant, buvait l’eau qui suintait du plafond de la caverne, assoiffant les moines. Ceux-ci demandèrent à la Vierge Marie de trouver une solution. Elle résolut le problème en transformant la pauvre bête en pierre 🙁 . Bien triste affaire que celle-ci…

Cette grotte sert donc d’abri à la petite chapelle de Panagia Arkoudiotissa, consacrée à la Vierge Marie. Les fidèles se réunissent ici chaque 2 février pour y célébrer la Présentation de Jésus au Temple lors d’une nuit de prières.

Mais cette caverne n’a pas toujours abrité le culte à Marie. Ainsi, des inscriptions font référence à Artémis et Apollon, enfants de Zeus. L’ours est d’ailleurs un des animaux associés à Artémis. Son nom-même serait d’ailleurs basé sur Arktos qui signifie « ours » en grec ancien.

Nous reprenons ensuite le chemin pour aller au monastère abandonné de Katholiko.

Le monastère de Katholiko

Le chemin dallé continue de descendre et peu de temps avant Katholiko, il plonge et dévale la pente dans une succession de zigzags.

Et il se fait attendre, le bougre. Il reste en effet caché pratiquement jusqu’au dernier moment.

Mais quel plaisir de découvrir ce monument blotti tout au fond de la gorge avec ce pont immense qui enjambe le ravin. L’esplanade soutenue par cette grande arche permet de rejoindre les cellules des moines (ou plutôt ce qu’il en reste), de l’autre côté du canyon.

D’autres cellules sont encore visibles, accrochées à flanc de falaise. Nous nous demandons d’ailleurs comment ils faisaient pour y accéder et par quels moyens ils ont réussi à construire cela. À première vue, seuls les chamois, les bouquetins et les chèvres sont capables de s’y rendre. Une chèvre est d’ailleurs en train de nous faire peur à sautiller de rocher en rocher !

Bref, ce site est vraiment spectaculaire ! Et il flotte ici une atmosphère assez particulière. En effet, ce lieu nous paraît hors du temps et réellement à part.

Le monastère

Ce monastère passe pour être le plus vieux de Crète et daterait en effet du VI^ème ou VII^ème siècle.

Mais des ermites semblent avoir occupé les nombreuses grottes ouvertes à flanc de falaise depuis le tout début du christianisme.

Nous sommes donc ici sur une terre depuis longtemps dédiée au recueillement et à la prière.

Situé au fond de la Gorge d’Avlaki, à 600 m de la mer, le monastère subit plusieurs attaques de pirates.

Dans le but de se protéger, les moines construisent alors un nouveau couvent, un peu plus en retrait dans la montagne. C’est ainsi que naît, dans la première partie du XVI^ème siècle, le monastère Notre Dame des Anges, devenu depuis Gouvernéto.

Dans le même temps, ils laissent Katholiko à son sort. Cet abandon semble être aussi en corrélation avec la mort de Saint Jean l’Hermite.

Saint Jean l’Ermite

On connaît aussi ce monastère sous le nom de monastère de Saint Jean l’Ermite (Agios Ioannis Erimitis).

Ce moine du début du XVI^ème siècle a en effet vécu ici. Il y est mort aussi.

La tradition rapporte qu’il ne se nourrissait que d’herbes et de caroubes. Gravement carencé, il ne pouvait plus se déplacer qu’à quatre pattes. Une nuit, un berger le tua, pensant qu’il s’agissait d’un bouquetin.

D’ailleurs, un petit oratoire est élevé à l’entrée d’une grotte toute proche de l’église du monastère. Il commémore la présence du saint homme dans ces lieux. Ainsi, très vite, la caverne devint un lieu de pèlerinage.

La gorge d’Avlaki

Après cette la visite des vestiges du monastère de Katholiko, nous décidons de poursuivre notre randonnée jusqu’à la mer.

Le fond de la gorge

Une fois ce danger passé, le chemin jusqu’à la crique est tout tracé et sans grande difficulté.

Cette gorge est très aride. Cependant, quelques arbres y poussent quand même, offrant un tout petit peu d’ombre parfois salutaire. Mais plus on s’approche de la côte, moins les arbres sont présents.

La crique

Katholiko Bay comme nous voyons souvent sur les cartes est en fait une petite crique tout en longueur. Il ne faut pas s’attendre à une plage mais à un bras de mer encaissé. Assis au bord des rochers, nous sommes à 3 ou 4 mètres au-dessus de l’eau.

Katholiko Bay est donc le point final de cette randonnée. Il faut maintenant penser à rebrousser chemin.

Nous n’avons malheureusement pas le temps d’explorer les environs. En fait, il paraît qu’un bateau pirate aurait été pétrifié ici suite aux malédictions lancées par les moines. Mais ces pierres en forme de navire et ces légendes nous rappellent celles de Muxia, tout au bout de notre pérégrination vers Compostelle.

Cette randonnée en Crète, à Katholiko, en bref :

Cette randonnée au monastère de Katholiko nous a vraiment bluffé. Nous nous attendions en effet à un site hors normes mais cela dépasse nos attentes. Nous nous réjouissons d’être venus en fin de journée : les lumières, dans la gorge d’Avlaki étaient magnifiques.

Cependant , nous avons quand même un peu regretté de ne pas pouvoir visiter le monastère de Gouvernéto. Mais aurions-nous eu le temps ?

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